© 2000 Bernard SUZANNE Dernière mise à jour le 24 décembre, 2000  
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Cette page fait partie de la section "Outils" de la version française d'une site, Platon et ses dialogues (version anglaise : Plato and his dialogues), consacré à présenter une nouvelle interprétation des dialogues de Platon. La section "Outils" a pour objet de fournir des informations sur le contexte historique et géographique (chronologie, cartes, notices sur les personnes et les lieux) dans lequel ont vécu Socrate et Platon. De plus amples informations sur la structure des notices et les liens qu'elles proposent se trouvent dans la note introductive à l'index des personnes et des lieux.

Prodicos, un des sophistes les plus souvent mentionnés par Platon dans ses dialogues, était natif de la ville de Iulis, dans l'île de Ceos, une colonie athénienne au large des côtes de l'Attique, à l'est du Cap Sounion. La date exacte de sa naissance n'est pas connue, pas plus que celle de sa mort, mais, en se basant sur diverses indications sur son âge relatif par rapport à d'autres sophistes et philosophes de la même époque, il est probable qu'il naquit aux alentours de 460 et il mourut très vraisemblablement après Socrate, puisque ce dernier parle de lui au présent dans l'Apologie (19e).
Prodicos vint souvent à Athènes, soit pour des missions officielles, soit pour ses propres affaires. Là, il gagna beaucoup d'argent en donnant des lectures publiques de ses œuvres et des leçons qu'il faisait payer très cher à de riches élèves (voir Hippias Majeur, 282c ; et aussi Cratyle, 384b, où Socrate explique qu'il n'a pu se payer la leçon à cinquante drachmes sur la précision des termes, mais seulement celle à une drachme). Parmi ceux dont on dit qu'ils suivirent ses leçons, on trouve Isocrate, Euripide et l'historien Thucydide. Il devait être particulièrement célèbre de son vivant à Athènes, puisqu'Aristophane le mentionne simplement par son nom dans les Nuées (v. 361), représentées pour la première fois en 423, et dans les Oiseaux (v. 692), représentés pour la première fois en 414, et il resta célèbre par la suite.
Il semble qu'il se soit spécialisé dans la définition précise des mots et dans la distinction subtile de mots presque synonymes et c'est pour cela qu'il est le plus souvent mentionné, et que Socrate s'en moque, dans les dialogues. Il ne nous reste pas grand chose de ses œuvres, sinon deux ou trois titres (Sur la nature de l'homme, cité par Galien, médecin grec du IIème siècle de notre ère ; Sur la nature, cité par Cicéron, De Oratore, III, 32, 128 ; Horai, c'est-à-dire les "Heures", citées dans une scholie sur les Nuées d'Aristophane, vers 361) et quelques citations ou références ça et là. Cependant, à partir de ces informations, il semble avoir été un sophiste et un rhétoricien universel, écrivant sur toutes sortes de sujets, y compris les sciences naturelles et la "physique". Sextus Empiricus, Contre les Mathematicians, IX, 18 ; 52, parle de lui comme d'un homme qui disait que les hommes avaient fait des dieux de ce qui leur était utile, le soleil, la lune, les rivières, les sources, les prairies, les récoltes, adorant le pain sous le nom de Déméter, le vin sous celui de Dionysos, l'eau sous celui de Poséidon, le feu sous celui d'Héphaistos, etc., le comptant donc parmi les athées. Galien y fait référence à propos de la définition de termes médicaux très techniques. Et ce qui ressemble le plus à un extrait de quelque envergure de ses œuvres, est le résumé du célèbre apologue du choix d'Héraclès dans les Mémorables de Xenophon, II, 1, 21-34 (qui, selon la scholie mentionnée plus haut, faisait partie des Horai). Cette histoire nous présente un jeune Héraclès au seuil de l'âge adulte qui rencontre deux femmes, l'une qui se présente sous le nom de Bonheur (Eudaimonia), bien qu'elle soit obligée de convenir que ses critiques l'appellent Vice (Kakia), et qui décrit une route facile de plaisirs sans fin tout au long de cette vie, l'autre, nommée Vertu (Arètè), qui décrit une longue route de travaux pénibles par lesquels l'homme doit obtenir ce qu'il désire au prix de grands efforts pour pouvoir vraiment en jouir et ainsi mériter des récompenses des dieux dans la vie future.

Prodicos est probablement le sophiste pour lequel Platon avait le plus de sympathie. Bien qu'il s'en moque souvent, il le présente néanmoins comme un maître (par exemple, Ménon, 96d) et ami de Socrate (dans l'Hippias Majeur, en 282c, Socrate appelle Prodicos son etairos, son "ami") d'une manière qui n'est pas qu'ironique. Il voyait sans doute dans sa recherche de précision dans le vocabulaire et de définition rigoureuse des termes une première étape, limitée cependant, vers la dialectique de Socrate (Socrate suggère peut-être quelque chose comme ça quand, au début du Théétète, en 151b, il déclare qu'il a envoyé de nombreux jeunes, qui ne lui semblaient pas "en mal d'enfantement" et susceptible de tirer parti de sa fréquentation, à Prodicos). Et de fait, dans la scène d'ouverture du Protagoras (315c-316a) lue comme je le suggère dans mon introduction à la seconde tétralogie, Prodicos "joue" le rôle du "logos", la partie la plus noble, de l'âme de la sophistique, isolé dans une pièce différente de celle où se pavanent Protagoras-epithumiai et Hippias-thumos. Cependant, du fait de sa vision par trop "mateérialiste" du logos, il était condamné à ne jamais atteindre son but, ce qui explique pourquoi Platon, pour le présenter dans cette même scène, le compare à Tantale à l'aide d'une citation de l'Odyssée, XI, 582. Il se peut aussi que Platon ait eu l'apologue d'Héra-clès de Prodicos présent à l'esprit en choisissant un interlocuteur nommé Kalli-klès pour défendre, dans le Gorgias, la voie de la force brute et du plaisir contre la route de vertu et de justice prônée par Socrate.

Les références à Prodicos dans les dialogues se trouvent en : Charmide, 163d ; Lachès, 197d  ; Protagoras, 314c ; 315c-316a ; 317c-e ; 336d-337c ; 339e-342a ; 347a ; 357e-359a (Prodicos est un interlocuteur actif du Protagoras, impliqué plusieurs fois dans la conversation par Socrate) ; Hippias Majeur, 282c ; Ménon, 75e ; 96d ; Apologie, 19e ; Banquet, 177b ; Phèdre, 267b ; République, X, 600c ; Cratyle, 384b ; Euthydème, 277e ; 305c ; Théétète, 151b. Prodicos est aussi mentionné dans les dialogues apocryphes suivants : Axiochos, Théagès and Eryxias, et joue un rôle important dans ce dernier.

Vers Perseus (site en anglais) : general lookup, encyclopedia, mentions in ancient authors.


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Première publication : en anglais : 4 janvier 1998 ; en français : 24 décembre, 2000 - Dernière mise à jour le 24 décembre, 2000
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